Ecoles de la Terre un jour - Ecoles de la Terre toujours !

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JOUR DE DISTRIBUTION DES NOUVEAUX UNIFORMES À L'ÉCOLE DE NABAKISHALAY À SONATIKARI SUR L'ÎLE KULTALI - WEST BENGAL - INDIA - MARS 2024

mercredi 24 mai 2017

L'EFFET MULTIPLICATEUR



J'ai eu le plaisir de vous écrire récemment ["Le microcrédit et l'aide humanitaire … La grande question de l'autonomie" du 30 avril 2017  sur ce Blog Ecoles de la Terre ainsi que sur notre page Facebook] que 2500 mères de famille participaient en permanence à notre "programme microcrédit" afin de développer de petites entreprises dans les secteurs de l'agriculture, de l'élevage, de l'artisanat, des transports, de la manufacture et des marchés.



Les bénéfices du microcrédit sont en totalité dédiés aux programmes d'Education & de Santé et ils produisent un effet multiplicateur. En effet, ce soutien économique promeut l'éducation des enfants, élève le niveau de vie des familles, engendre l'autonomie des parents et assure une part du financement des écoles et des centres de formation. Et puis, la promotion du statut des mères de famille vient justifier l'objectif que nous nous sommes fixés depuis les premiers jours : améliorer les conditions de vie des mères et de leurs filles dans une société qui ne leur offre que trop peu de place.


Amitiés à Toutes et Tous !



Martial pour Ecoles de la Terre

mercredi 10 mai 2017

AU DÉSERT DU THAR CONTRE VENTS ET "SABLÉES" !




QUELQUES DONNÉES GÉOGRAPHIQUES …

Le désert du Thar ou le grand désert indien comme nous l'appelons aussi, est d'une superficie de 200'000 kilomètres carrés. Il s'étend du nord-ouest de l'Inde, au Rajasthan, jusqu'au Pakistan où il est appelé le désert du Cholistan. Il est bordé par le fleuve Indus à l'Ouest et par la chaîne de montagnes des Âràvalli à l'est.


Comparé au reste de l'Inde en général, le désert du Thar est très peu peuplé, avec ses villages très espacés les uns des autres sur un territoire ensablé, rocailleux, parsemés de haies et de bosquets. Davantage qu'un désert tel qu'on peut se le représenter en carte postale, il ressemble à une étendue de steppe où l'on peut voir une végétation très clairsemée où seules les dunes plutôt étendues en sont dépourvues. Les routes sont bien entretenues par l'armée omniprésente dans le district de Jaisalmer; la ville du même nom, capitale du district, est située à 100 kilomètres de la démarcation indo-pakistanaise. La frontière avec le Pakistan est en effet proche et invite à une vigilance certaine.


Pour irriguer le désert du Thar, Ganga Singh, le dernier grand Maharaja de Bikaner, a fait creuser au début du 20ème siècle un long canal acheminant l'eau en provenance du Penjab, à plus de 600 kilomètres au nord-est. Aujourd'hui ce canal, appelé Indira Ghandi, a été prolongé jusqu'à Barmer [à 161 kilomètres par la route de Jaisalmer] avec de grosses canalisations de 1,40 mètre de diamètre, enterrées afin d'éviter l'évaporation. L'Etat a construit également des citernes à proximité des agglomérations; l'eau y est amenée par camion et par chameau.


SUR LES CONDITIONS DE VIE AU DÉSERT …

Nous pouvons imaginer que dans une telle région la pluviométrie est plutôt limitée; en effet, le désert du Thar reçoit en moyenne moins de 200 mm d'eau par année; près de 90% des pluies annuelles arrivent avec la mousson, de juillet à septembre. Jusqu'alors, les températures ne cessent d'augmenter, de mars à juin, pour atteindre les 50° au cours des deux derniers mois [mai et juin]. J'ai quitté Jaisalmer à fin avril par 45° !


Sous ses apparences hostiles, le désert est un lieu de vie où les hommes et les animaux doivent affronter la chaleur, l'éclat du soleil, le manque d'eau et bien souvent l'insuffisance de nourriture. Mon message ne vous propose pas une démonstration de géopolitique; il a pour but de vous confirmer que dans cet endroit aride et austère, les conditions de vie sont effectivement rudes, la plupart du temps inhospitalières, trop souvent pénibles et épuisantes. La densité moyenne de la population indienne est d'environ 380 habitants au kilomètre carré, un densité très forte compte tenu de la grandeur de son territoire [3'287'263 kilomètres carrés]. À titre de comparaison, le district de Jaisalmer qui embrasse le désert du Thar compte 672'000 habitants répartis sur un territoire de 38'401 kilomètres carrés. Sa densité n'est ainsi que de 17 habitants au kilomètre carré.


Le 30 janvier 2010 j'écrivais au sujet du Thar; "il s'agit bien d'un désert que les humains, comme les cailloux, comme les végétaux, comme les animaux, ont marqué de leur présence, de leur empreinte, de leur sceau, de leurs stigmates, de leur histoire; bref, tout un espace de vie, sèchement estampillé par la signature de l'homme confronté aux éléments d'une nature coriace, impitoyable, rugueuse, parfois inhumaine" ! Et bien je vous confirme que cette citation est à mon sens aujourd'hui on ne peut plus appropriée. J'ai quitté le désert en toute fin d'avril dernier et je m'ennuie de ces grands espaces où le ciel me tend ses bras et l'horizon me sert un grain d'éternité !


NOS ÉCOLES DANS LE DÉSERT …

Les élèves de nos écoles du désert de même que leurs familles vivent dans une pauvreté certaine; nous les côtoyons depuis de nombreuses années - année scolaire 2005-2006 - et savons bien que beaucoup d'entre eux souffrent de malnutrition et manquent cruellement de soin. Pour notre branche de Jaisalmer, nous avons comme objectif prioritaire d'offrir l'éducation au plus grand nombre d'enfants possible. Nous souhaitons encore développer notre assistance en ce qui concerne l'hygiène et la santé, notamment en ce qui concerne la qualité de l'eau. Au cours de la dernière année scolaire, qui s'est achevée au 31 mars 2017, nos écoles du Rajasthan accueillaient près de 700 élèves, soit un peu plus du 13% de l'effectif total d'Ecoles de la Terre en Inde [5'200 élèves].


Nous relevons que la topographie des villages du désert du Thar a comme caractéristique d'être très étendue, donc très clairsemée. Cet état de fait ne facilite pas notre tache, et principalement la création d'écoles susceptibles d'accueillir un maximum d'enfants. À cela s'ajoute, les difficultés à se déplacer d'une localité à l'autre, les grandes chaleurs en journée durant une grande partie de l'année, le manque d'eau potable; au surplus les mentalités locales, confinées dans leurs fermetures et leurs traditions, ne favorisent pas l'adhésion des familles à l'éducation et l'ouverture au monde.


Je vous invite bien volontiers à relire notre blog du 3 avril 2014 au cours duquel je vous parle de la sécheresse, de la malnutrition et de la pauvreté qui tuent, le plus souvent à petit feu. Dans ce message j'exprimais le fait qu'hormis notre mission première visant à instituer une structure d'éducation pour le plus grand nombre d'enfants de ces villages, c'était aussi les conditions de la vie domestique, alimentaire, sanitaire, économique et sociale qui nous occupaient l'esprit, nous absorbaient et nous inquiétaient parfois, tant la misère est présente et affecte les familles les plus nécessiteuses, malheureusement trop nombreuses.


Je suis partagé entre le bonheur de pouvoir participer à la campagne de scolarisation des enfants du désert et l'angoisse de ne pouvoir en faire davantage; mais je me dis que si nous ne baissons pas la garde, ainsi pourrons-nous renverser un tant soit peu le cours des choses et ainsi travailler encore et encore pour l'amélioration des conditions de vie de ces populations miséreuses, avec au bout du compte quelques bons résultats. Sur ce point notre espoir peut se baser sur une volonté solide, riche de quelques succès.


Nous comptons à ce jour, dans le district de Jaisalmer au Rajasthan, six écoles ainsi qu'un centre d'apprentissage pour jeunes femmes, récemment ouvert en périphérie de la ville de Jaisalmer. Ce nouveau centre, du nom de Myriam Vocational Training Center, est notre dernière concrétisation et il représente pour nous tous un grand pas en avant. En effet, nous souhaitons développer ce secteur afin d'étendre les perspectives d'emplois à l'intention des jeunes, et principalement des jeunes filles. Aller au devant des aspirations de la jeunesse et leur proposer quelque chose de plus que les seuls métiers liés au tourisme, tel est le projet que nous souhaitons développer pour l'ensemble des branches d'Ecoles de la Terre en Inde. Depuis 15 ans nous gérons nombre de centres d'apprentissage au Bihar, autre branche d'Ecoles de la Terre. Depuis la dernière scolaire 2016-2017 [1er avril 2016-31 mars 2017], nous conduisons ce même programme dans deux autres régions de l'Inde, l'Ouest Bengale [Îles des Sundarbans] et le Rajasthan [district de Jaisalmer].


Si vous tapez "éducation et villages dans le désert du Thar" sur un moteur de recherche du web [internet], vous y trouverez des propositions de voyages, des invitations aux visites des sites du désert, des suggestions de circuits touristiques et autres incitations aux camps du désert ! Vous y découvrirez tarifs et disponibilités à foison. Trouver un billet d'avion, réserver un hôtel, louer un appartement ou une voiture, réserver un voyage sur mesure, sélectionner un trek du désert, ce sont autant de service proposés aux voyageurs, grands consommateurs de découvertes et de villégiature.   


Alors oui, le tourisme est un grand roi et il revendique toutes les publicités et les incitations à la découverte des lieux magiques et autres sites classés au patrimoine du monde; tout cela à la gloire du consumérisme, à la célébrité du monde hôtelier, à la commercialisation des traditions culturelles ! Et l'humanitaire ! Qui est-il ! Il n' est en réalité qu'un petit sujet limité au silence de la bienfaisance et du philanthropisme, à la discrétion des quelques organisations humanitaires présentes sur ce terrain mercantile, animé par le seul appât du gain, réduit au secret de la dialectique confrontant les fait de donner et de recevoir ! L'humanitaire en catastrophe n'est guère présente dans le désert du Thar; il est confiné à la discrétion silencieuse d'un monde domestique, à l'insonorité des besoins et à l'omission d'actions susceptibles de les satisfaire; ces situations sont devenues la règle des lieux, une règle soumise à l'économie locale réceptrice de circonstances touristiques.


Chères amies, Chers amis, je vous remercie de tout cœur pour l'intérêt que vous portez à Ecoles de la Terre. Je vous envoie mes pensées les plus chaleureuses du désert ! Avec mon amitié !

Martial Salamolard pour ECOLES DE LA TERRE

   

dimanche 30 avril 2017

LE MICRO CRÉDIT ET L’AIDE HUMANITAIRE … LA GRANDE QUESTION DE L’AUTONOMIE !




Comme me le dit William Mellgren de la Fondation CUF, notre sponsor et notre conseiller de toujours, il s’agit de bien savoir où Ecoles de la Terre se situe sur la ligne de la charité ! En effet, cette interrogation est pour nous cruciale. Elle préfigure la question qui est de comprendre si nos actions de soutien à l’éducation, à la santé et à l’aide sociale, ont des vertus d’efficacité plutôt que de charité !


L’adage du pêcheur et du poisson est sans doute sur les lèvres de nombre d’entre vous ; il est dans notre esprit chaque jour et inspire chacune de nos actions ; mais encore faut-il correctement l’interpréter. Il est certain que ce proverbe, plutôt attribué à Confucius, retient chez Ecoles de la Terre une grande attention. Cette maxime nous dit  que "lorsqu’un homme a faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner un poisson".


Certaines critiques à cet adage chinois peuvent se résumer ainsi. La femme et l’homme, à qui on pourrait proposer une formation à la pêche sont absents de cette expression. Et je rajouterai une question à cet avis ; que veut cette femme, que veut cet homme ; que pense-t-elle, que pense-t-il ? Est-ce qu’elle souhaite, est-ce qu’il souhaite apprendre à pêcher ? Nous nous sommes donc posé la question et nous l’avons posée sur le terrain de nos programmes à celles et ceux que nous soutenons à travers nos divers programmes d’éducation, de santé et de soutien économique.  Nous organisons des rencontres avec les parents de nos élèves, des meetings avec les mères bénéficiaires de notre programme de microcrédit, des réunions avec les utilisateurs de nos services sanitaires. Lors de tous ces rendez-vous les questions relatives à l’acquisition du savoir et des compétences sont régulièrement présentées, traitées puis négociées.


Vous aurez bien compris qu’Ecoles de la Terre souhaite plutôt enseigner que seulement donner, sans compter les effets sur l’avenir, sans tenir compte du développement inhérent au don, à l’aide et à l’assistance. Nous mettons l’accent avant tout sur la collaboration, la coopération, sachant bien que dans nos activités, celles-ci prennent de l’ampleur si les faits de donner et de recevoir sont issus d’un objectif commun, améliorer le sort des enfants et de leurs familles, changer le cours des choses pour une population pauvre et nécessiteuse.


Je souhaite rappeler ici le sens du proverbe bien connu du "pêcheur et du poisson" en prenant pour critère d’appréciation notre programme de microcrédit. Et je profite ici de citer une variante à cet adage ; certains disent que "si nous donnons un poisson à un homme, il mangera un jour ; si nous lui apprenons à pêcher, il mangera toujours". Ce proverbe, enveloppé de variantes, traite indiscutablement de la question de l’autonomie, question également cruciale pour Ecoles de la Terre ; je vais jusqu’à dire que la question de l’autonomie, en tant que liberté et volonté d’une population de se financer et s’administrer elle-même,  représente pour nous la pierre angulaire qui se doit de singulariser et marquer notre mission.
    

Depuis le début de l’année 2010, nous avons mis sur pied notre programme de microcrédit que nous appelons aussi "Earning Education", une expression difficile à traduire en langue française ; nous proposons l’interprétation suivante : "l’épargne et l’investissement des populations pour le financement de l’éducation". Ce programme, que nous présentons en détail dans notre site internet et notre blog de voyage, consiste à octroyer de petits crédits aux mères de famille des villages et des zones suburbaines où nous œuvrons. Ces mères bénéficiaires de prêts, une fois sélectionnées par le staff responsable d’Ecoles de la Terre, travaillent et s’auto-choisissent en groupe de 5 afin de favoriser l’esprit de solidarité et promouvoir une plus grande efficacité.


Au cours de ces 7 dernières années [2010 à 2017], plus de 15'000 mères ont disposé et profité des crédits d’Ecoles de la Terre afin de démarrer et/ou développer leurs petites entreprises familiales. J’observe avec bonheur et  j’ai le plaisir de vous informer que la totalité, le 100%, des prêts accordés ont été remboursés dans les 3 États où le programme est déployé, l’Ouest Bengale [les Îles des Sundarbans], le Bihar et le Rajasthan. 2'500 familles, sous la direction gestionnaires des mères, bénéficient en permanence du soutien proposé par notre programme de microcrédit. Près de 100'000'000 de roupies indiennes [1'700'000 Francs Suisses] ont été mis à la disposition de ces mères afin de lancer et développer leurs entreprises familiales et monétiser leurs villages, jusqu’alors dépouillés de tout flux financier.


Notre ferme volonté, c’est de passer des actions de charité à l’accès à l’autonomie et de pouvoir au surplus mesurer l’impact sur l’investissement engagé ; autrement dit, être à même d’évaluer, puis de calculer le bénéfice social généré pour les communautés soutenues. Par bénéfice social [social benefit], nous comprenons la participation des familles à l’éducation et au développement professionnel [en faveur des filles principalement] ; l’amélioration du statut des mères de familles et l’accroissement des revenus des communautés ; l’amélioration des conditions sanitaires, la maintenance des usines de purification de l’eau et la participation des familles aux charges de santé.


Concrètement, cette démarche éducationnelle, sociale et économique présuppose que nos actions soient considérées comme un "tout", à savoir que nos efforts en matière d’éducation prennent aussi en compte l’état de santé de nos étudiants et s’attachent également à traiter l’aspect économique des familles qui forment la société d’où sont issus nos élèves et  nos apprentis. Je résumerai cette approche en vous disant qu’Ecoles de la Terre met en œuvre ses programmes sous l’angle de la conjugaison des actions et la recherche d’un effet multiplicateur englobant l’étudiant, la famille, le bilan sanitaire et la conjoncture économique des populations pauvres pour lesquelles nous travaillons.


À la faveur de ces efforts et moyennant les produits d’intérêts du programme de microcrédit, pour une large part, de même que la participation des familles au financement des écoles et les contributions naissantes de sponsors indiens, nos dépenses de fonctionnement sont aujourd’hui autofinancées à hauteur de 41% de notre budget de dépenses. En effet, notre budget pour l’exercice 2017-2018 [du 1er avril 2017 au 31 mars 2018] se chiffre à 11 millions de Roupies Indiennes [185'000 Francs Suisses] ; le financement extérieur assuré par Ecoles de la Terre Genève se monte à 65 millions de Roupies Indienne [109'000 Francs Suisse] et l’autofinancement ici Inde se chiffre à 45 millions de Roupies Indiennes [76'000 Francs Suisses]. Sachant que les donations ont tendance à se raréfier en Europe, je pense que nous sommes sur la bonne voie de l’autofinancement intégral des coûts opérationnels [frais de fonctionnement des écoles et des centres]. Le plus vite nous réaliserons notre objectif de l’autosuffisance à 100%, le mieux nous pourrons nous consacrer au financement de nouveaux projets [constructions ou extensions de nouvelles écoles, de nouveaux centres d’apprentissage, de nouveaux collèges, de nouvelles stations de purification d’eau, de nouveaux dispensaires, de nouvelles structures de santé, etc …].


C’est aussi une manière comme une autre de concevoir, d’objectiver puis concrétiser  l’adage de Confucius, repris de bien des façons par tant d’économistes, de philosophes ou autres essayistes … "lorsqu’un homme a faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner un poisson". Et c’est encore l’assurance d’étendre notre soutien à d’autres enfants,  à d’autres familles, à d’autres populations, tous moins privilégiés.


J’exprime ma reconnaissance à l’égard de celles et ceux qui ont pris le temps de lire ce message ; et je dis toute ma gratitude à celles et ceux qui nous encouragent et nous soutiennent. Avec mes chaleureuses pensées.

Martial Salamolard pour ECOLES DE LA TERRE