Chères amies, chers amis, je ne veux pas vous inonder
de messages, seulement vous communiquer, au rythme des saisons, l’essentiel des
nouvelles d’Ecoles de la Terre.
LE FLÉAU DE LA TRANSMISSION OU LES 4 MOIS D’UN
NAUFRAGE MONDIAL
Le 29 mars dernier je vous disais que nous étions sans
doute en début de tempête. Je vous parlais de la pandémie du Covid19 qui
étendait ses ailes contagieuses et tentaculaires à travers le monde.
Eh bien voilà une crise qui touche la terre entière.
Je ne m’avancerai guère en vous disant que tous les humains sont touchés ;
je me dois d’ajouter qu’une part d’entre eux sont des naufragés, occupés à maintenir
la tête hors de l’eau alors que d’autres sont déjà coulés.
LE SUBCONTINENT INDIEN OU 17% DE LA POPULATION
MONDIALE
L’évolution du Covid19 en Inde est très particulière
compte tenu de la dimension démographique, de la situation économique, de la
structure sociale et de l’organisation du secteur de la santé du pays.
Avec 1 milliard et 300 millions d’habitants, une croissance
économique qui s’effondre, une disparité toujours aussi flagrante entre riches
et pauvres et un système de santé qui ne faillit pas à la règle des inégalités
sociales, nous pouvons bien comprendre que la crise sanitaire qui sévit depuis
mars 2020 non seulement complique la tâche des gouvernants mais encore laisse
sur le bas-côté les plus pauvres et nombre de gens déjà fragiles avant ladite
tempête.
C’est dans ce cadre peu reluisant que nous œuvrons et
tentons de faire face aux événements de ce 1er semestre. À la crise
sanitaire qui nous paralyse depuis maintenant plus de 4 mois sont venus
s’ajouter, le cyclone Amphan qui a ravagé nos écoles des îles des Sundarbans de
l’Ouest Bengale les 20 et 21 mai derniers et l’invasion de criquets pèlerins
qui, 10 jours plus tard, anéantissait les récoltes du Rajasthan.
LE GRAND MALHEUR OU LA FATALITÉ DES DÉSHÉRITÉS
C’est la guigne, c’est la déveine, c’est la poisse qui
semble persistante et met ainsi en péril plus de 20 ans d’inlassable labeur. Ecoles
de la Terre est certes une ONG de moyenne taille, mais elle représente une
portion d’eau non négligeable dans l’océan de la misère du monde.
Suite aux décisions des autorités d’imposer un
confinement généralisé, "lockdown", dès la mi-mars, les 5000 élèves
et apprentis de nos programmes d’éducation se retrouvent disséminés dans leurs
petits villages. Les 4000 mères bénéficiaires de notre programme microcrédit
ont dû cesser ou mettre en veilleuse leurs activités de micro-entrepreneuses,
perdant ainsi leur gagne-pain familial pour un temps indéterminé. Nos usines
d’assainissement et de distribution d’eau potable aux îles Sundarbans ont
suspendu leur production faute d’électricité à la suite du cyclone de mai
dernier. Nombre de familles de nos élèves, œuvrant dans l’agriculture ou
l’élevage, voient leurs activités paralysées par l’impossibilité de livrer leur
production, tout accès aux marchés des bourgs et villes voisines leur étant
interdit.
Nos budgets établis en février dernier pour notre
année scolaire 2020-21 ne sont bien entendu plus adaptés à nos besoins. Parmi
les 6315 familles liées à Ecoles de la Terre par nos différents programmes de
soutien, 4'082 d’entre elles ont eu recours à notre assistance jusqu’à ce jour.
L’aide alimentaire, la distribution de masques de protection, la mise à
disposition de produits d’hygiène, les prises en charge de cas médicaux
extrêmes et le soutien aux familles endeuillées suite au coronavirus
représentent nos principales interventions provoquées par cette crise hors du
commun.
L’AIDE INCONTOURNABLE OU LA GÉNÉROSITÉ DE NOS AMI/ES
Dans ces moments de grande crise il est de bon ton de
rappeler les symboles du "donner" et du "recevoir". Que
ferait la pauvreté sans la générosité ? Elle serait encore plus
indigente !
La misère et le dénuement, comme la richesse et
l’opulence, vivent leur normalité, leur légitimité au rythme du quotidien comme
pour titiller la souffrance et le bien-être, jusqu’à ce que des événements de
la vie que l’on appelle des crises, viennent encore mettre en évidence leur
dissonance au risque d’amplifier la disharmonie, le désordre et le chaos.
J’ai à cœur de souligner ici le fidèle soutien des
marraines et parrains, des sponsors et bienfaiteurs, des amies et amis d’Ecoles
de la Terre qui, en dépit des limites et des freins provoqués par cette
récession, poursuivent leur assistance et leur aide, ajoutant encore du crédit
à leurs inestimables donations.
L’ENVIE DE NE PAS TOMBER OU LE MOT DE LA FIN
Notre budget annuel prévoyant quelques 13 millions de
roupies, environ 180'000 Francs suisses, devient un plan financier compliqué à
l’entrée de cette année scolaire qui a démarré aux premiers jours d’avril
dernier. À l’issue du seul 1er trimestre de cet exercice 2020-2021,
avril à juin, Ecoles de la Terre Genève a dû financer plus de 2 millions de
roupies supplémentaires, 30'000 Francs suisses, afin de couvrir les charges
provoquées par le Covid19, celles-ci se rapportant aux aides alimentaires et
sanitaires apportées à plus de 4000 familles, aux compensations de recettes
indiennes non réalisées suite au confinement, ainsi qu’aux réparations et
reconstructions effectuées après le passage dévastateur du cyclone Amphan dans
les îles des Sundarbans.
À l’heure où j’écris ces lignes, en Inde, la pandémie
n’a pas atteint son pic de contamination. Le confinement vient d’être à nouveau
décrété dans l’Etat du Bihar et le district de South 24 Parganas dans l’Etat de
l’Ouest Bengale. À peine les affaires reprenaient-elles pour les familles de
notre programme de microcrédit, que ce nouveau coup d’arrêt vient contrecarrer
nos plans et semer le doute dans nos prévisions !
Toutes nos écoles sont fermées depuis la
mi-mars ; les directeurs de nos établissements planifient les visites
quotidiennes auprès de nos élèves afin d’assurer un suivi scolaire que nos
enseignants conduisent dans les dizaines de villages du Bengale, du Bihar et du
Rajasthan. Nous souhaitons dispenser au mieux les programmes éducatifs et
préparer ainsi nos prochains tests de connaissance. Nous tenons aussi à
maintenir le lien avec les enfants, leurs familles, et faciliter la prochaine
reprise des cours qui toutefois demeure bien hypothétique.
En effet, l’incertitude prédomine quant à l’évolution
de la pandémie du coronavirus. Aujourd’hui, à mi-juillet 2020, l’Inde
s’inquiète de la progression exponentielle du Covid19 et la barre du million de
cas confirmés vient d’être franchie. Ces chiffres sont publiés par les
instances statistiques gouvernementales et relayées par les médias ; ils
sont cependant largement sous-estimés.
Ce pays est à 75 % rural et la plupart de ses villages
sont isolés du monde ; il est de surcroît constellé de bidonvilles sur
l’ensemble de son territoire et son système de santé est autant sous-financé
qu’inégalitaire. L’Inde peut craindre le pire et jouer à tout moment une course
contre la montre, un rallye contre la mort.
C’est dans ce contexte qu’Ecoles de la Terre tente de
gérer au mieux ses programmes d’éducation, de santé, d’hygiène et d’assistance.
Puisse le ciel nous entendre et nous donner la force de combattre ce satané
parasite, ce titan microscopique.
Que Dieu vous bénisse et que la vie vous protège ainsi
que vos proches. Amitiés à Toutes et à Tous.
Martial Salamolard pour ECOLES DE LA TERRE
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