Ecoles de la Terre un jour - Ecoles de la Terre toujours !

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JOUR DE DISTRIBUTION DES NOUVEAUX UNIFORMES À L'ÉCOLE DE NABAKISHALAY À SONATIKARI SUR L'ÎLE KULTALI - WEST BENGAL - INDIA - MARS 2024

samedi 15 mars 2014

LE BIHAR, LE POIDS DES TRADITIONS, LA PAUVRETÉ, LE FARDEAU DES CASTES. UN DÉVELOPPEMENT RESTÉ EN RADE. LA PRÉSENCE D’ECOLES DE LA TERRE !




 CHÈRES AMIES, CHERS AMIS,

Avant d’entamer la dernière étape de mon séjour 2014 au Rajasthan – District de Jaisalmer & Désert du Thar – je  vous parle dans le présent « blog » de nos activités au Bihar, où je me trouve encore en ce moment, un Etat de l’Inde encore en voie de développement, en retard sur bien des domaines par rapport aux autres régions du subcontinent indien. La crise économique qui sévit partout dans le monde s’est également propagée en Asie du Sud, ce qui a compliqué la donne pour les régions les plus défavorisées, dont le Bihar bien sûr.


 D’une façon générale le Bihar évolue tout de même un petit peu vers le modernisme, principalement dans les villes où quelques progrès sont visibles, notamment en matière d’aménagement des routes, de construction et de salubrité. Mais lorsque vous parcourrez les zones rurales de cet Etat, davantage peuplé que la France ou l’Allemagne, je me dis que peu de choses ont changé depuis mon premier passage au printemps 1998, que les villages que je visite appartiennent encore et toujours à un autre siècle.


Le poids des castes et de ses traditions est encore bien présent et accable toujours profondément les populations les plus pauvres, les plus fragiles, les hors castes ; les « dalits » ou les « harijans » comme on les appelle ici ! « Harijan » ce mot sanskrit qui signifie « créature de Dieu » a été donné par le Mahatma Gandhi pour qualifier les Intouchables, pour les réhabiliter en quelque sorte ! Si ce mot fait bien dans le paysage, il n’en demeure pas moins que l’appellation « dalit » est la plus souvent utilisée pour parler des Intouchables, des parias, ce groupe d’êtres humains exclu du système des castes comme le sont les aborigènes d’Australie et d’ailleurs.


Il serait faux de dire que rien n’a été fait dans cette région parmi les plus pauvres de l’Inde. Depuis quelques années un mouvement anti-corruption se fait jour dans l’Inde entière. Le Bihar est bien sûr visé par ce fléau qui a conduit le gouvernement vers le marchandage et les alliances avec des mouvements maffieux et des groupes d’intérêts peu recommandables. Aujourd’hui nous dit-on, l'adoption de nouvelles réformes par le gouvernement, avec le soutien financier et technique de la Banque mondiale, a aidé cet Etat à améliorer la gestion des finances publiques et à réinvestir le produit de ces économies dans l'amélioration de la scolarisation, dans le développement de programmes de vaccination et dans la lutte contre la corruption. Dans la forme c’est sans doute vrai ; mais dans le fond les changements réels tardent à s’opérer, notamment en matière de scolarisation en zone rurale. Je suis là pour l’attester, pour le certifier ; ce que je fais au paragraphe suivant.


L’organisation et la gestion des écoles gouvernementales de villages sont pour le moins catastrophiques dans nombre de régions rurales indiennes. J’en veux pour preuve mes deux dernières visites dans la région de « Maher » qui se trouve en pleine campagne à une trentaine de kilomètres de la ville de Gaya-Bihar. Il y a là 27 villages que j’ai tous traversés et où je me suis arrêté. Au total, sept écoles gouvernementales sont destinées à assurer l’éducation de plus de 2000 enfants pour les programmes des niveaux « maternel à classe 5 ». En réalité, moins de 500 élèves viennent « épisodiquement » dans ces écoles. Les programmes ne sont pas respectés, je devrais dire jamais tenus ; les enseignants sont davantage absents que les élèves ; bref, la corruption bat son plein dans toute sa splendeur, au détriment des enfants qui ne comprennent pas ce qui se passent au juste, et à la grande colère des parents qui me l’ont fait savoir ! Devant un tel désordre, une telle gabegie, nous avons décidé de les écouter et nous imaginons une éventuelle action dans le futur ; affaire à suivre. Ces situations sont trop nombreuses dans les villages de l’Inde, ce pays dont la vie campagnarde embrasse encore près de 70% de sa population !


Que fait-on dans cette galère, d’aucuns pourraient bien penser ou nous le demander ! Il m’arrive parfois de me poser la même question ; mais bien vite le bon sens de la mission « Ecoles de la Terre » prend le dessus. Nous sommes là, justement, pour participer au renversement des choses, pour accueillir les enfants les plus pauvres, et parmi eux beaucoup d’harijans, qui ne pourraient sans notre soutien, ni entamer, ni poursuivre un cursus scolaire digne de cette expression. C’est un travail de longue haleine qui prend beaucoup d’énergie et nécessite une motivation à toute épreuve. Dès que le doute s’installe, il faut revenir à l’essentiel, nous demander pourquoi nous sommes là ! Un jour, nous nous sommes dits : travaillons pour faire valoir les droits à l’éducation en faveur de ces enfants ! Alors à nous de tenir cette promesse et de renverser le courant, à nous de rester !


Aujourd’hui en 2014, Ecoles de la Terre prend en charge un certain nombre d’écoles, de centres d’apprentissage pour jeunes filles et de programmes médicaux dont je vous donne ci-après les chiffres et données principaux. L’ensemble des programmes scolaires et d’apprentissage concernent 2850 élèves, répartis en 1650 filles [58%] et 1200 garçons [42%]. Le surplus de filles [16%] s’explique par nos centres d’apprentissage accueillant exclusivement les jeunes filles. Pour nos seules écoles, la parité [50-50] est respectée entre filles et garçons. Depuis toujours, nous obligeons les familles à nous envoyer leurs filles, faute de quoi nous n’acceptons pas leurs garçons.


Je n’irai pas jusqu’ à vous dire que la galère du Bihar prend chez Ecoles de la Terre la forme d’un bateau de plaisance. Mais tout de même, à force d’imposer nos principes, à force de dialoguer avec les parents qui deviennent nos principaux partisans sur le terrain et nos défenseurs face à l’adversité, je peux vous dire que nos actions vont dans le bons sens, que nos programmes sont respectés.  Nous atteignons ainsi notre principal objectif, celui de renverser la courbe de l’analphabétisme qui prévalait auparavant.


Pour terminer ce message « bihari », j’envoie, je décoche, comme un jet de poésie, le nom de nos écoles du Bihar, avec un ou deux mots de circonstance pour chacune d’elle. ● Il y a « Camijuli », 14 ans d’âge, la première née dans le village d’Itra, avec ses 2 petites succursales, « Bandha » et « Manjibigha », du nom de leur village, qui toutes sentent bon la campagne ; elles accueillent près de 1'100 élèves. ● Au village de Baiju Bigha, Il y a  « Sujata », du nom d’une fillette qui dans la légende sauva le Bouddha d’une mort de faim certaine, qui reçoit 240 enfants. ● Il y a dans le village de Nain Bigha depuis plus de 10 ans « Jolibigha – Matijoli », une grosse maison dans la prairie lointaine qui héberge 610 élèves. ● Il y a depuis l’année 2008 « Saraswati School », du nom de la déesse hindoue des arts et de l’éducation qui accueille 530 enfants. ● Il y a depuis 2010 « WillyWidalya » dans les champs de Baheradi, une petite école coquette qui reçoit 205 élèves. ● Et puis, il y a encore « Bharti » à Kusumbara et ses 70 élèves, école qui fut construite en 2012 en l’honneur de Bharti, la petite fille orpheline née entre 2 rails de chemin de fer à la gare de Dehri-On-Sone. Je terminerai cette liste en vous citant nos centres d’apprentissage ; ● celui « Rudraksha » à Baiju Bigha, un centre aux mille couleurs, et ses 230 jeunes filles, plus vives les unes que les autres ; ● celui de Pahara dans la ville grise de Gaya, la capitale du district, et ses 75 jeunes filles,  attentionnées à souhait ; ● celui de Dehri-On-Sone, la ville sur la route de Bénarès et ses 110 jeunes filles à l’attitude sérieuse et provençale ! Tous ces lieux, toutes ces écoles, tous ces centres dont je voulais vous citer les noms !


 Avec ma reconnaissance pour tout ce temps que vous avez donné. Merci !


 Amitiés,


 Martial Salamolard pour ECOLES DE LA TERRE


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