Au sujet des photos de ce Blog : merci de noter pour l’instant
que les 3 premières photos représentent notre école de Bandha ; les 5
suivantes, celle de Manjibigha, les 8 dernières, celle de Camijuli. Nous
distinguerons ci-dessous ces 3 établissements qui constituent le « complexe
scolaire de Camijuli » dans le district de Gaya, au Bihar. Au préalable,
j’ai jugé utile de rappeler dans ce Blog quelques données relatives à la
démographie indienne et quelques éléments caractéristiques propres au monde
rural indien.
PETIT RAPPEL SUR LA DÉMOGRAPHIE INDIENNE
Avec une population estimée à environ 1,25 milliard
d'habitants, l'Inde est le deuxième pays le plus peuplé du monde, après la
Chine. La population est jeune. Malgré la baisse sensible du taux de mortalité,
consécutive à un meilleur niveau de vie et à une amélioration de la santé
publique dans certains milieux, la fécondité reste encore élevée dans les zones
rurales, en partie pour des raisons d’ordre culturel.
La surmortalité infantile des filles, toutefois en
régression, est toujours bien réelle, et l'Inde est l'un des rares pays au
monde qui compte moins de femmes que d'hommes. Cette situation est très
préoccupante, aussi bien pour son équilibre démographique que pour sa stabilité
socio-politique. La politique de contrôle et de limitation des naissances,
engagée peu après l'indépendance, demeure toujours une priorité pour le
gouvernement. Celui-ci a souvent hésité entre l'adoption d'une attitude
autoritaire ou la mise en place de campagnes préventives. Nombre d’institutions
non gouvernementales, dont la nôtre, ont entrepris des actions concrètes dans
le sens de la prévention.
Nous savons qu’il y a une nette corrélation entre le taux
d'alphabétisation et la baisse de la fécondité ; mais pour ce qui est de l’Inde,
ces efforts demeurent inégaux en ce qui concerne les politiques d'éducation, des
femmes en particulier.
PETIT RAPPEL SUR LE MONDE RURAL INDIEN
L'Inde aux 700 000 villages conserve une très forte
tradition rurale. Au moment de l'indépendance, la majeure partie des terres
était détenue par un petit nombre de grands propriétaires. Le système de la
propriété foncière était à l’aube des années 50 un héritage de la colonisation
britannique.
Les Britanniques avaient introduit, dans un pays où la notion
de propriété privée n'existait pas, un ou plusieurs intermédiaires [le zamindar
ou jagirdar selon les régions] entre l'État, qui collecte taxes et impôts, et
l'agriculteur, qui travaille la terre. Le zamindar se contentait de vivre de la
rente que lui procurait une terre qu'il ne cultivait pas, reversant une partie
des fonds à l'État. L'agriculteur était souvent lourdement endetté auprès de
lui, ce qui conduisait à des pratiques proches de l’esclavage. Le gouvernement
lança donc une réforme agraire ambitieuse, afin notamment, d'éliminer
l'intermédiaire et de redistribuer les parcelles. Celle-ci cependant, n'eut
qu'une portée limitée ; les paysans les plus riches purent conserver leur
pouvoir et leurs terres, alors que les plus pauvres n'en ont guère tiré de
bénéfices. C’est bien pour cela que certains leaders indiens luttent depuis de
nombreuses années pour l’amélioration des paysans sans terre ; de grands
mouvements, dont celui d’Ektaparishad fondé et emmené par Raj Gopal que nous
connaissons personnellement, reçoivent une adhésion massive et une reconnaissance
toujours plus forte de la part des autorités indiennes.
Ainsi, à trois quart rurale, la population indienne est disséminée
dans ces quelques 700 000 villages sur un territoire six fois plus grand que la
France. En ce qui concerne les Etats fédérés où Ecoles de la Terre travaille,
nous comptons plus de 40’000 villages pour le Bengale occidental, plus de
45’000 pour le Bihar, plus de 41’000 pour le Rajasthan et plus de 160 pour le
seul territoire citadin de Delhi.
CAMIJULI L’ÉCOLE DES 15 VILLAGES
Vous pourriez me dire, mais que fait-on dans cette immensité
rurale ? Alors j’aimerais vous chanter la ballade bien connue de « la
petite goutte d’eau dans l’océan ». L’ensemble de nos programmes –
éducation, apprentissage, santé et micro-crédit – pour l’ensemble de nos
Branches indiennes concernent toutefois plus d’une centaine de villages ;
c’est une goutte d’eau « conséquente » susceptible de
faire des vagues !
L’école de « Camijuli », ouverte en janvier 2001
dans le district de Gaya, au Bihar, reçoit les enfants de 15 villages
relativement proches les uns des autres. Nous avions visité cette région à
plusieurs reprises quelques années auparavant et nous nous étions rendu compte du
déficit notoire en matière de scolarisation pour les enfants de ces
agglomérations. C’est de cette école, bâtie à Itra, l’un de ces 15 villages,
dont je souhaite vous parler aujourd’hui. Elle est devenue un véritable
complexe scolaire, cela du fait que nous avons dû décentraliser un certain
nombre de classes pour les plus petits. Les demandes d’admission ne cessant
d’augmenter, nous ne disposions plus assez d’espace pour recevoir décemment
tout le monde dans notre premier bâtiment de « Camijuli » à Itra.
C’est ainsi que pour l’année scolaire 2011-2012, nous avons
décidé d’ouvrir dans les villages de Bandha et de Manjibigha deux nouvelles
petites écoles – sortes de dépendances de Camijuli – destinées à recevoir les
plus jeunes élèves – ceux des classes maternelles et ceux de la classe primaire
de degré 1.
L’idée fut d’offrir davantage d’espace pour les
élèves des classes 2 à 10 dans notre bâtiment central, mais encore d’éviter aux
plus petits enfants des déplacements parfois trop longs et périlleux ; en
effet, certains villages se trouvent à quelques 4 à 5 kilomètres de notre école
de « Camijuli ». Afin de
poursuivre dans cette voie, nous envisageons pour les années à venir d’ouvrir de
nouvelles dépendances, semblables aux 2 premières, dans les autres villages les
plus éloignés.
Le bâtiment principal de « Camijuli School »
accueille aujourd’hui 760 élèves, soit 355 filles et 405 garçons. Notre
dépendance de Bandha reçoit 170 élèves, répartis paritairement en 85 filles et
85 garçons et celle de Manjibigha, 195 élèves, soit 130 filles et 65 garçons.
Le total des élèves de notre complexe scolaire de
« Camijuli » se chiffre à 1’125
enfants, répartis en 570 filles et 555 garçons. Une fois de plus, nous tenons à
souligner que nous sommes particulièrement exigeants en matière de répartition
« filles – garçons », et pas moins fiers si celle-ci est respectée. Si les circonstances nous ont été favorables
en ce qui concerne la zone rurale de « Camijuli », nous ne pouvons
pas toujours en dire autant dans les autres écoles. Dans certaines régions, des
traditions enracinées continuent à vouloir favoriser la position du « mâle »
dans la communauté ; et il nous faut parfois du temps avant de convaincre
les familles de l’absolue nécessité de respecter la parité « homme – femme ».
Nous aurons sans doute l’occasion de reparler de ce sujet dans d’autres Blogs.
Après 12 années de vie et d’expérience dans cette région du
Bihar, nous percevons l’immense importance d’une structure d’éducation
organisée et permanente pour une population comme celle-là. En début du mois de
mars prochain, je reviendrai dans ces mêmes lieux avec Françoise Frossard,
membre d’Ecoles de la Terre, afin d’analyser plus en détail les incidences d’une
telle structure mise en place pour cette population.
Chères Amies, Chers Amis, je vous remercie sincèrement
d’avoir pris le temps de lire ces lignes. Je vous en suis reconnaissant pour
votre intérêt et pour votre patience. Je vous transmets mon plus cordial
message.
Bien à Vous Toutes et Tous,
Martial Salamolard
ECOLES DE LA TERRE
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